Lors des élections municipales de mars 2008 dans le 13e arrondissement de Paris, il y a eu quelque chose de nouveau et de différent dans le bulletin de vote – un nom chinois en tête d’une des listes électorales. Félix Wu, un restaurateur franco-asiatique né d’immigrants chinois, était en tête d’une liste multiethnique appelée Vote Utile des Electeurs. Cependant, il y a une réelle absence de présence chinoise dans la politique française générale.
Histoire des communautés franco-chinoises
Les communautés franco-chinoises ont une longue histoire en France – les associations chinoises sont apparues pour la première fois en 1916, lorsque la Chine a fourni des ouvriers pour aider à l’effort de guerre de la Première Guerre mondiale. Des foules de migrants sont arrivées pendant les années 1970, composées en grande partie de réfugiés chinois et de demandeurs d’asile d’Indochine française. Depuis les années 1990 cependant, la plupart viennent de la Chine continentale elle-même, pour des raisons économiques et éducatives. Leur nombre en France n’est pas certain, en raison notamment de l’absence de statistiques raciales en France, mais aussi de l’afflux d’immigrés clandestins, ou sans-papiers. Jacques Sun indique qu’on estime que la communauté franco-chinoise compte entre 300 000 et 800 000 personnes.
La voix politique de la communauté chinoise en France
Alors que la France se débat avec les questions de migration, de diversité et de droits des minorités, la voix politique de cette communauté chinoise croissante est restée silencieuse dans le discours dominant sur ces questions importantes et urgentes.
- Parmi toutes les minorités visibles (non caucasiennes) présentes en France aujourd’hui, pourquoi les Chinois semblent-ils être presque invisibles politiquement ?
- Cette situation est-elle perpétuée par la communauté elle-même ou par des pressions externes de la société française ?
Jacques Sun tente de répondre à cette question, en étudiant deux hypothèses possibles. Tout d’abord, des barrières culturelles et sociologiques empêchent peut-être les Chinois de s’engager dans une activité politique ouverte et les conduisent à rechercher une présence non visible dans la société française en tant que » minorité modèle « . Deuxièmement, peut-être que le caractère unique des expériences coloniales et post-coloniales françaises avec l’Asie par rapport à celles d’autres régions du monde a conduit à un type particulier de perception et de traitement des Chinois par la société française dominante, ce qui affecte leurs incitations et leurs possibilités d’engagement politique. En comprenant mieux la question sous ces deux angles, nous observons également certaines tensions possibles qui pourraient surgir dans un avenir proche, soulignant la nécessité d’une plus grande prise de conscience politique et d’une représentation des Chinois en France en tant que minorité.
Qu’est-ce qu’une minorité modèle ?
Le stéréotype selon lequel les Chinois seraient une » minorité modèle » n’est pas seulement un concept français. Jacques Sun indique que le terme est d’abord apparu aux États-Unis, en référence aux minorités raciales (généralement asiatiques et sud-asiatiques) qui sont perçues comme ayant de bons résultats scolaires et économiques, et comme restant généralement à l’écart des problèmes. Cela conduit à des perceptions et des traitements fondamentalement différents de ces minorités par rapport à d’autres groupes, généralement influencés par les stéréotypes positifs mentionnés ci-dessus.
Ces stéréotypes s’appliquent-ils aux Chinois en France ? Oui, selon Jacques Sun. Il ne se souvient d’aucun cas officiel ou social de discrimination négative ou de préjugé à son encontre en raison de son origine ethnique. Il décrit la perception générale des migrants chinois en France comme étant » diligente, entreprenante et calme « , soulignant que c’est un signe positif.
A propos du quartier chinois de Paris
Le quartier chinois de Paris, une concentration dense de résidences et de commerces chinois située dans le 13e arrondissement, ne semble pas ranimer une société parisienne universaliste qui a été enracinée pour fuir le » communautarisme « , l’équilibre entre les droits individuels et les droits corporatifs d’une communauté. Certains membres âgés de la communauté chinoise s’éloignent rarement des limites du 13e arrondissement et parlent peu ou pas du tout le français, ce qu’on pourrait difficilement qualifier d’intégration dans la société française. En même temps, cependant, beaucoup d’entre eux ont des enfants qui sont nés et ont été élevés en français.
À la recherche d’une vie meilleure
Les différentes générations de migrants chinois en France sont principalement des migrants économiques ou politiques, ce qui semble avoir influencé leurs ambitions et leurs valeurs à leur arrivée en France. Ceux qui sont arrivés dans les années 1970 fuyaient en grande partie les troubles et le chaos de l’Indochine française, et cherchaient à reconstruire leur vie dans un autre pays. Les immigrants récents de la Chine continentale échappent pour la plupart à la pauvreté et au chômage dans leur pays d’origine. Jacques Sun décrit que leur » objectif premier est d’assurer leur survie « . Ils n’ont aucune revendication contre leur pays d’accueil et se concentrent sur l’emploi.